Dans un discours prononcé jeudi, le Premier ministre Boris Johnson a menacé que toute personne entrée irrégulièrement au Royaume-Uni serait relocalisée dans le pays d'Afrique centrale et orientale.
"Notre capacité à aider les gens n’est pas indéfinie.", a-t-il déclaré en avertissant les réfugiés et les migrants qui traversent la Manche et atterrissent sur le sol britannique.
Johnson a déclaré que "des milliers de réfugiés" pourraient être transportés au cours des années dans le cadre de ce programme.
Cependant, les groupes de défense des droits de l’homme et les organisations de la protection de réfugiés ont rapidement fustigé ce qu'ils ont qualifié de plan «cruel», «inhumain» et «néocolonial», et ont remis en question son effet négatif sur la migration.
« C'est vraiment choquant et inhumain. Le plan ne va pas diminuer le nombre de réfugiés. Cela infligera une énorme quantité de cruauté et alimentera la mise en place de routes plus dangereuses pour les réfugiés. », a déclaré Steve Valdez-Symonds, directeur du programme sur les droits des réfugiés et des migrants à Amnesty International Royaume-Uni.
Les gens s'échangeaient comme des "marchandises"
Certains détails sont encore un peu flous mais tous les réfugiés arrivant au Royaume-Uni par bateau seront envoyés au Rwanda. Si leur demande est acceptée, ils n'obtiendront pas le statut de réfugié au Royaume-Uni mais se verront accorder l'asile par le Rwanda. Ceux qui échouent pourraient être renvoyés dans leur pays d'origine ou dans un autre pays où ils ont le droit de résider.
Par conséquent, si la proposition est mise en œuvre, les personnes fuyant l'Irak, la Syrie, l'Érythrée ou le Soudan seront très probablement transportées au Rwanda avant même d'avoir déposé une demande d'asile - ce qui entraînerait à terme une baisse drastique des demandes d'asile.
La proposition entrera en vigueur après l'adoption d'une loi actuellement examinée au Parlement qui pourrait criminaliser tout réfugié entrant dans le pays sans visa valide.
À l'échelle mondiale, moins de 1 % seulement des réfugiés dans le monde ont accès à une réinstallation sûre et directe par l'intermédiaire des Nations Unies. Les autres sont obligés de prendre leur avenir en main et de traverser les frontières pour demander directement l'asile.
En claquant la porte aux demandeurs d'asile, le gouvernement britannique se dérobe à ses responsabilités et aggravera la crise.
L'agence des Nations Unies pour les réfugiés a également exprimé son opposition.
« Les personnes qui fuient la guerre, les conflits et la persécution méritent compassion et empathie. Ils ne doivent pas être commercialisés comme des marchandises et transférés à l'étranger pour y être transformés », a déclaré Gillian Triggs, Haut-Commissaire assistant du HCR.
Selon les activistes dans le domaine de la protection des réfugiés, le gouvernement brittonique envisage de délocaliser ses responsabilités sur les anciennes colonies au lieu de faire sa juste part pour aider certaines des personnes les plus vulnérables de la planète.
Le langage utilisé par Johnson dans son discours était assez connu. Des expressions telles que "reprendre le contrôle des frontières britanniques" ont été des éléments clés de son appel aux électeurs pro-Brexit lors de la campagne de 2016, qu'il a co-dirigée.
Cependant, malgré la promesse de Johnson de limiter les traversées de la Manche, le nombre de personnes arrivant sur les côtes britanniques a considérablement augmenté ces dernières années.
Plus de 28 000 migrants et réfugiés sont venus par les petits bateaux de l'Europe vers le Royaume-Uni l'année dernière, soit plus du triple par rapport au chiffre de 2020.
En novembre de l'année dernière, 27 personnes sont mortes alors qu'elles tentaient de rejoindre le Royaume-Uni lorsque leur bateau a coulé dans la pire catastrophe qui se soit produite sur la Manche.
Selon un récent sondage, 60% du public britannique est mécontent de la politique migratoire du gouvernement.
La politique du double standard dans l’accueil des migrants
L'accord, que le ministre de l'Intérieur Priti Patel a signé lors d'une visite à Kigali jeudi, est intervenu alors que de plus en plus de réfugiés ukrainiens arrivent au Royaume-Uni par le biais de divers programmes de visas que le gouvernement a mis en place à la suite de l'invasion russe en février.
Jusqu'à présent, plus de 55 000 visas ont été délivrés à des réfugiés ukrainiens et 16 400 d'entre eux sont déjà arrivés au Royaume-Uni.
Le régime sioniste, un modèle d’inspiration dans la brutalité anti-réfugiés
Le Royaume-Uni n'est pas le seul pays à avoir cherché à externaliser ses demandes d'asile.
Le Parlement danois a également adopté une loi en juin 2021 qui lui permettrait de relocaliser les demandeurs d'asile vers des pays tiers hors d'Europe, malgré les critiques généralisées de l'Union européenne, des Nations Unies et des groupes de défense des droits.
Le régime sioniste a également conclu des accords secrets en 2013 avec le Rwanda et l'Ouganda pour transférer les demandeurs d'asile du Soudan et de l'Érythrée. L'arrangement a échoué lorsque les réfugiés - qui se sont vu confisquer leurs papiers et n'ont reçu aucune protection - ont fui le Rwanda pour se lancer dans un dangereux voyage vers l'Europe, a révélé une étude de l'Université d'Oxford en 2018.
Cette politique a été vivement critiquée pour avoir causé des souffrances incommensurables à des dizaines de demandeurs d'asile qui ont subi de graves abus et des traitements inhumains dans des conditions déplorables.
Al Jazeera
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