Dans un reportage très glaçant, la RFI retrouve les deux opérateurs téléphoniques du Croissant-Rouge palestinien qui ont entendu les derniers cris des deux filles. Les deux opérateurs ont essayé de calmer leurs interlocuteurs, mais la haine sioniste aboutit à une tragédie. Les criminels israéliens finissent les filles dans le sang.
Le téléphone sonne. 29 janvier 2024. Au bout du fil, Layan Hamada. Jeune gazaouie, âgée de 15 ans. Elle est terrifiée. « Ils nous tirent dessus ! », dit-elle. « Le char est juste à côté ». Ses derniers mots : « Nous sommes cachés dans notre voiture. »
C’est Omar Alqem, jeune bénévole du Croissant-Rouge qui a pris cet appel ce jour-là : « J’avais l’impression de flotter au-dessus de mon corps. Je n’arrivais pas à comprendre ce à quoi je venais d’assister. J’ai tenté de retrouver mes esprits. Je me suis dit : je ne peux pas céder à l’émotion, ou alors, j'arrête de faire ce travail. Mais ce n’est pas possible d’arrêter. Dans cette guerre, trop de gens dépendent de nous ».
Hind, seule autour de sa famille décimée
Omar rappelle le numéro. Cette fois-ci, c’est une fillette âgée de 6 ans qui décroche. Son nom : Hind Rajab. « J’ai parlé une dizaine de minutes à Hind, poursuit le bénévole. Elle a su m’expliquer qui était autour d’elle dans la voiture. J’ai tenté d’imaginer la situation, où est-ce qu’elle était cachée dans l’habitacle. J’ai compris que six membres de sa famille, étaient tous morts autour d’elle. Et là, je me suis dit : c’est trop, je ne peux plus continuer ».
À partir de là, c’est Rana Faqih qui prend le relais. Elle travaille au Croissant-Rouge depuis 13 ans : « J’ai commencé par me présenter, explique-t-elle. Je lui ai dit : " Je m’appelle Rana". La pauvre petite était en état de choc. Elle m’a dit qu’elle s’appelait Soujoud, puis Hind… »
« Venez me chercher »
Rana tente de rassurer la fillette : « Imaginez la scène : une petite fille dans une voiture pleine de cadavres. Parfois, elle me disait : ils sont tous en train de dormir. Et parfois, elle me disait : "Ils sont tous morts. Il y a du sang partout. Il y a des chars." Elle les voit. Elle entend les tirs et l’aviation… ». La fillette implore. Supplie. « J’ai si peur. Venez me chercher. »
Alors que Rana continue de rassurer Hind, ses collègues s’activent auprès des autorités israéliennes, afin d’obtenir l’autorisation de se rendre auprès de la petite, dans la ville de Gaza où sont déployées les troupes israéliennes : « On a eu le feu vert [de l’armée] pour envoyer une ambulance dans la zone où se trouvait Hind. On était toujours en ligne avec elle, et en même temps en lien avec nos secouristes. Et tout d’un coup, on a entendu des tirs. Jamais on n’aurait pensé que c’était l’ambulance qui était ciblée. Elle était presque au niveau de Hind. Et là, la communication avec les ambulanciers et avec Hind a été interrompue. On est restés sans nouvelles durant douze jours ».
Samedi 10 février 2024. L’armée israélienne se retire de la zone. L’ambulance est retrouvée pulvérisée. Les deux secouristes, Hind Rajab, sa cousine et les autres membres de leur famille, sont tous morts.
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