L'utilisation du phosphore par Israël dans une attaque contre le village de Dhaïra, dans le sud du Liban, doit faire l'objet d'une enquête en tant que « crime de guerre », a déclaré mardi l'organisation de défense des droits de l'homme, Amnesty International.
L’ONG internationale a déclaré que l’armée israélienne a eu recours à cette arme incendiaire lors d'opérations militaires entre le 10 et le 16 octobre 2023, près des villes d'el-Mari, Aïta el-Chaab et Dhaïra.
Trois jours plus tôt, L’Orient-Le Jour révélait que Dhaïra avait été frappée par du phosphore blanc, avec photo, vidéos, ainsi que témoignages de résidents et des premiers secours à l’appui. Les résidents avaient rapporté à L’OLJ que l’attaque avait débuté aux alentours de 16h, le 16 octobre. L’enquête de notre publication dévoilait notamment des clichés des projectiles retrouvés dans cette ville avec l’inscription « M825E1 » : des obus d'artillerie au phosphore blanc, de fabrication nord-américaine, déjà utilisés par les Israéliens à Gaza en 2008-2009.
L'armée israélienne a tiré « illégalement »
Amnesty International a affirmé que l'armée israélienne a tiré « illégalement » des obus d'artillerie contenant du phosphore blanc lors d'une « attaque aveugle » qui a blessé au moins neuf civils et « endommagé des biens civils » dans la localité frontalière de Dhaïra, le 16 octobre.
« Que l'armée israélienne ait utilisé du phosphore blanc de manière aveugle en violation du droit humanitaire international va au-delà de l’horreur. L'utilisation illégale du phosphore blanc (...) a sérieusement mis en danger la vie des civils, dont beaucoup ont été hospitalisés et déplacés, et dont les maisons et voitures ont pris feu », a déclaré Aya Majzoub, directrice régionale adjointe pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord à Amnesty International.
« L'utilisation du phosphore blanc est restreinte par le droit international humanitaire. Même si son usage peut être légal, celui-ci ne doit jamais être tiré sur ou à proximité d’une zone civile peuplée ou sur une infrastructure civile, en raison de la forte probabilité que les incendies et la fumée qu’il provoque se propagent », poursuit le rapport. Il ajoute que le phosphore blanc, exposé à l’oxygène, peut à nouveau s’enflammer même des semaines après le déploiement.
Les villes de Aïta el-Chaab et el-Mari
Amnesty International apporte également d'autres preuves d'attaques au phosphore blanc sur ce village les 10 et 13 octobre, ainsi que des frappes sur Aïta el-Chaab et el-Mari.
« Deux vidéos vérifiées par le Laboratoire de preuves de crise (Crisis Evidence Lab ) d’Amnesty International, filmées le 10 octobre autour d'el-Mari, montrent des coins de feutre enflammés descendant vers le sol et déclenchant des incendies généralisés, ce qui indique presque certainement l'utilisation de phosphore blanc », a déclaré l'organisation dans un communiqué sur son site web.
« Amnesty International a également vérifié une vidéo et cinq photos du bombardement de Aïta el-Chaab, le 15 octobre, qui montrent très probablement l'utilisation d'un mélange de cartouches de phosphore blanc et de projectiles d'artillerie à haut explosif standard », a-t-elle ajouté.
L'organisation internationale analyse par ailleurs un cliché pris par un photographe de l'AFP le 18 octobre d'un soldat israélien à la frontière avec le Liban aux côtés d'obus fumigènes au phosphore blanc de 155 m. Récemment, Human Rights Watch avait déjà documenté une utilisation de phosphore par Israël au Liban-Sud, dans des zones rurales, le 10 octobre.
Depuis le 7 octobre, les affrontements entre le Hezbollah et Israël se sont intensifiés le long de la frontière.
Source : L’Orient-Le Jour (média francophone libanais)