17 juil. 2022, 16:04
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La Russie, l’Iran et l’Inde reliés par le corridor Nord-Sud, un pas supplémentaire vers un monde multipolaire

Téhéran (IRNA)- La massive fréquentation des cargos commerciaux des pays d'Asie centrale, de l'Inde et de la Chine en Iran, malgré les sanctions mondiales, indique que les routes de transfert des marchandises via l'Iran sont très attrayantes et abordables.


Depuis plusieurs années, de nombreux analystes prophétisent le passage à un monde multipolaire, ponctué par une rivalité sino-américaine en toile de fond. A travers le projet International North–South Transport, la Russie, l’Inde et l’Iran semblent tenter de jouer leurs propres partitions, poussés par l’avancée de la Chine en Asie centrale via le projet Belt and Road Initiative et les alliances américaines dans le Pacifique et l’océan Indien.

Le 12 juin 2022, des cargaisons russes sont parties du port d’Astrakhan, sur la mer Caspienne, afin de rejoindre le port indien de Nhava Sheva, non loin de Bombay. Lors de ce voyage, deux porte-conteneurs seront déchargés au port iranien d’Anzali, puis, après avoir été transférés via la route jusqu’au golfe persique, la cargaison devrait arriver en Inde. Ce nouveau corridor nommé International North–South Transport Corridor (INSTC)- ou simplement le corridor nord-sud - devrait donner la possibilité à l'Inde de recevoir toutes sortes de marchandises de la Russie, y compris du gaz, du pétrole et du blé.

Les fondations de ce projet datent du 12 septembre 2000, à la suite d’un accord gouvernemental entre les trois pays. En 2005, l'Azerbaïdjan s’est joint au projet, suivi par d’autres pays (Biélorussie, Bulgarie, Arménie, Kazakhstan, Kirghizistan, Oman, Tadjikistan, Turquie, Ukraine). Ce corridor aurait pour ambition d’interconnecter les ports et les villes de Saint-Pétersbourg, Moscou, Téhéran, Bakou, Bandar Abbas, Astrakhan, Anzali, Mumbai, etc.

En mars 2020, un protocole d’accord pour le transport de marchandises le long de ce réseau multimodal de 7200 km a été signé entre la société d’État indienne Container Corporation of India (Concor) et la société, contrôlé in fine par la Fédération de Russie, Russian Railways Logistics Joint Stock Company (RZD).

Pour information, au vu de l’ampleur du sujet, cet article va se concentrer sur le trio Inde, Russie et Iran, et ne sera bien sûr pas exhaustif sur les jeux d’acteurs et d’influences en Asie centrale.

Dans le cadre des sanctions occidentales contre l’Iran et sa situation économique, ce corridor semble permettre à l’Iran de (re)devenir un carrefour commercial de grande envergure entre la Russie et l’Inde, lui donnant l’occasion de profiter des taxes prélevées sur les transits. De plus, afin d’augmenter son interconnectivité, l’Iran semble profiter de ce projet pour attirer des investissements et développer ses infrastructures. Par exemple, le vendredi 10 juin 2022, le ministre des Affaires étrangères Hossein Amir Abdollahian a déclaré que l'Iran et l'Inde avaient convenu d'augmenter les investissements dans le port de Chabahar. Ce port iranien reçoit depuis 2012 des financements de la part de l’Inde, un projet plus ancien ayant été avorté à la suite de pressions américaines. Il est à noter que le principal concurrent de Chabahar est le port pakistanais de Gwadar, financé et contrôlé par la Chine. Le port de Chabahar était le premier port iranien en eau profonde, le port de Bandar Abbas qui gère 85 % des transports maritimes iraniens ne pouvant pas recevoir de bateaux de plus de 100 000 tonnes.

De plus, le développement du port de Chabahar à l’embouchure du golfe d’Oman a permis à l’Iran de se doter d’un atout stratégique, même si le détroit d’Ormuz venait à être bloqué, la République islamique d’Iran pourrait toujours avoir accès à l’océan Indien. La position de ce port, couplée au projet de corridor, pourrait permettre à l’Iran de devenir un carrefour commercial, offrant une solution de désenclavement aux pays d’Asie centrale. Par exemple, cela offre à l’Afghanistan une deuxième voie pour accéder à la mer autre que le Pakistan. C’est dans ce cadre que de nombreux projets d’infrastructures en partie financés par Téhéran ont fleuri, par exemple, le tronçon kirghize du projet routier Iran-Afghanistan-Tadjikistan-Kirghizistan-Chine et le tunnel d'Anzob au Tadjikistan.

Autre exemple de développement d’infrastructure iranienne, le port d’Astara au sud-ouest de la mer Caspienne qui a été inauguré en mars 2013 et intégré au corridor nord-sud afin d’améliorer la connectivité maritime de l’Iran. Un port qui a été relié par un chemin de fer au port de Shahid Rajaee, faisant partie du complexe de Bandar Abbas, en juin 2021. Ainsi, via ce chemin de fer, l'Asie centrale enclavée obtient une liaison ferroviaire plus courte vers le golfe Persique, confortant la nouvelle place de ce port comme « plaque tournante maritime dans la région de la Caspienne ».

Pour l’Iran, le corridor Nord-Sud est un formidable outil permettant de stimuler son économie sous sanctions. Des échanges commerciaux avec des pays sanctionnés qui semblent de plus en plus poussés à une dédollarisation de cette zone. Au début de l’année 2022, L’Iran, qui a été intégrée l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS) en septembre 2021, a proposé à l’OSC une nouvelle monnaie à la Chine, la Russie, l’Inde et le Pakistan afin de contourner les sanctions occidentales.

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